Dans un contexte d’égalité des droits et des chances, une asymétrie perdure entre les enseignants des enfants sourds, très majoritairement entendants, assurant non sans difficultés leur tâche, et les sourds souhaitant y participer.
La langue des signes, manifestation du saut qualitatif que les sourds ont offert à la gestualité naturelle jusqu’à en faire une langue à part entière, fait d’eux des êtres autrement capables dès le plus jeune âge. Mais elle se donne à voir et exige d’être vue, au lieu de donner à entendre, et c’est ce qui l’a longtemps perdue.
Le malentendu qui fait que la société voit les sourds avant tout comme des personnes en situation de handicap plutôt que comme une minorité linguistique n’est pas le seul paramètre pour expliquer que la question de la langue d’enseignement aux enfants sourds soit encore souvent subordonnée à la présence de figures militantes ou d’enseignants ayant un profil de compétence peu répandu.
Ce livre fait suite à une étude exploratoire menée dans le cadre d’une thèse de doctorat qui a obtenu le 1er prix de thèse décerné par l’INSHEA en 2017.
Une recherche qui a mis en lumière les aspects historiques, structurels et sociolinguistiques de la place des sourds dans l’enseignement et dans les formations.
La réticence des jeunes sourds pour s’engager dans des diplômes universitaires et accéder au professorat est peut-être la marque la plus tenace de la résilience qu’exige d’eux le système scolaire et de l’inconfort scolaire qui teinte toute leur trajectoire. Pourtant, dès qu’ils ont la possibilité de se former, surtout au sein des associations, ils font la preuve que professeurs sourds et professeurs entendants ont tout à gagner dans la complémentarité… pour proposer plus de confort dans les apprentissages et une meilleure réussite scolaire à leurs élèves.