Handicap mental et sexualité sont des objets empreints de trouble. Suscitant fascination et dégoût, ils se sont longtemps dérobés à l’investigation par les sciences sociales. Les recherches sociologiques sur la sexualité se sont heurtées à la forte résistance sociale face à l’objectivation d’un tel objet, dont on considère qu’il doit sa beauté à son aura de mystère, de secret, de sacré [Bozon, Leridon, 1993]. Le handicap mental, socialement perçu comme un état dramatique et donc particulièrement indésirable, génère une angoisse qui en ferait un objet de recherche triste et repoussant. En outre, handicap mental et sexualité ont longtemps été – et restent encore souvent – envisagés comme des faits de nature relevant de la biologie et de la médecine, bien davantage que comme des construits sociaux pouvant être appréhendés par les sciences sociales.
Ce livre constitue une avancée indéniable dans un champ peu exploré par les sociologues, où la mise en perspective historique est associée à des analyses ancrées dans le présent auprès des différents segments de population qui constituent le champ : les personnes désignées comme handicapées, leurs entourages professionnels et familiaux et, enfin, une nouvelle catégorie d’acteurs, les assistants sexuels. Il démontre avec beaucoup de finesse et de détails tout l’intérêt de travailler les questions de sexualité avec des groupes minoritaires ou dominés, souvent considérés à tort comme exclus du champ de la sexualité. L’abord de cette thématique auprès de ces groupes dévoile, comme un miroir grossissant, les idéologies contemporaines de la sexualité, au-delà des approximations et des généralités qui sont construites dans les soi-disant grandes enquêtes sur les comportements sexuels en population générale.

École INSHEA - Suresnes